L'ECOLE PORTUGAISE D'ART EQUESTRE

Salon du Cheval de Montpellier 2001

Interview du Docteur Filipe Graciosa
Directeur et Ecuyer en chef de l'Ecole Portugaise d'Art Equestre


Après avoir apprécié avec grand plaisir une première fois le spectacle, nous nous sommes penchés à la seconde représentation sur les aspects purement équestres des prestations.

En lever de rideau du spectacle de prestige du Salon du Cheval de Montpellier, la "Reprise des Douze" des cavaliers de la Garde Républicaine.

Une entrée majestueuse, une chorégraphie inventive et d'une grande fluidité…régularité, rythme; harmonie, homogénéité…nous sommes en basse école mais on frise la perfection.

 

La présentation de l'Ecole Portugaise d'Art Equestre est constituée de six tableaux :


Le travail en main

Après la Garde Républicaine, changement de décor, changement d'équitation : nous sommes ici d'emblée dans le rassembler.
Les cinq chevaux sont présentés nattés à la portugaise, queues nattées, en selle à piquer et chabraque. Ils sont en rênes fixes, tenus en caveçon par une corde passée et croisée par dessus le garrot.
Chevaux en boule, dans la rondeur, débordant d'impulsion : piaffers, levades, cabrioles…
Malgré la violence de certains airs comme la cabriole, ce qui frappe c'est le grand calme des chevaux et des écuyers, la parfaite relaxation (les chevaux soupirent, s'ébrouent )
Tout est demandé sans brusqueries, avec des aides discrètes.
Discutant après la représentation, avec l'écuyer en chef, je m'étonnais de ne pas avoir vu de "courbettes". Le cheval, spécialisé dans cet air qui demande une force peu commune, était tout simplement resté au Portugal pour…faire des saillies.

Levade
Les Longues Rênes
Le cheval Alter est en filet et en rênes simples, sans passage par des anneaux au niveau du surfaix.
A main gauche l'écuyer est à hauteur de la hanche gauche du cheval, main gauche au niveau de la hanche gauche du cheval, légèrement plus haute que la main droite posée sur l'autre hanche du cheval.
Il règle ses pas sur le poser des postérieurs de son cheval, jambes gauche fonctionnant en parallèle avec le postérieur gauche du cheval.
Pour appuyer à droite, l'écuyer porte ses deux mains à gauche, donnant le pli à droite.
On remarque la grande habileté des mains qui se portent, au gré des exercices, du même coté, des deux cotés, sur la hanche, sur la queue… Au galop la main de l'écuyer se fixe, se relâche, se fixe…tout comme dans le travail monté
Le solo de l'Ecuyer en Chef

L'Ecuyer en Chef a un physique, une présence. Il est profondément assis, sobre, relaxé, serein…
Le trot est très rassemblé, lent mais tonique, plein de rebond.
On sent chez ce cheval une fougue, une énergie peu commune, régularisée et maîtrisée par son cavalier.
On peut regretter que la musique ne soit pas à l'unisson de ce trot éclatant.

Le contact se fait sur un filet bien tendu, la bride en léger contact : on peut observer de temps à autre quelques descentes de mains, marques d'une équitation de légèreté.
Au galop on remarque d'abord l'extrême stabilité de la cadence, quelles que soient les figures, la fluidité et la netteté des changements de pli.

Cliquez pour aggrandir Cadence et rectitude des changements de pieds jusqu'aux deux temps. Notons la grande fixité du buste de l'écuyer, à comparer avec ce que l'on peut voir sur certaines carrières !
Tact du cavalier, qui sachant que son cheval ne maîtrise pas encore parfaitement cet exercice, se contente de trois changements au temps.

Vient ensuite la leçon de piaffer et de passage.
Manifestement, l'écuyer recherche le dynamisme, la relaxation et la lenteur du geste. Ces deux airs sont très écoutés , suspendus et toujours bien engagés.
Une observation attentive des jambes du cavalier montre à la fois leur précision et leur relaxation.
 

 

Les airs relevés
Même airs, levades, piaffers, cabrioles, que lors du travail en main, mais présentés montés.
Toutes les préparations se font au piaffer, au rassembler maximal.
Lorsque que le rassembler est maximal, le cheval est tellement engagé, les postérieurs tellement sous la masse , que la plus légère indication de la main l'incite à décoller ses antérieurs pour se mettre en levade et s'y maintenir.

Même préparation pour les cabrioles.
 Le cheval se rassemble en galopant "terre à terre", c'est à dire qu'il raccourcit tellement ses foulées, avec une grande bascule de tout le cops, qu'il finit par pouvoir détacher avec vivacité son corps du sol, se projeter en l'air et décocher sa ruade au sommet de sa trajectoire.

Bien entendu le cavalier doit être solide en selle et éviter toute crispation inutile.

Jamais d'énervement, un grand calme, des aides légères, de fréquents temps de repos et des récompenses…voilà ce que l'on apprend…
Le maître mot est "sérénité"!
Et retour au calme lorsque les écuyers se remettent en ordre pour la sortie !

 

Passage
Le pas de trois
Rien à signaler de particulier.
C'est toujours la même approche et la même recherche d' harmonie

Le Carrousel à dix

La cadence est beaucoup plus lente que celle adoptée par la Garde Républicaine.
Les chevaux ne sont pas les même, les objectifs et le rassembler non plus.
La soumission des chevaux, tous étalons, est totale : chaque cheval a pratiquement le nez dans la queue de celui qui précède.
Le galop est à quatre temps, sur les hanches, très assis.

 

Appuyers





Le carrousel est long, très long… nous ne sommes pas ici dans le spectacle mais dans le travail, le recueillement, le sérieux et la rigueur.Nous sommes dans le travail construit, longuement préparé…on prend son temps…

Et de cette lenteur, de cette sérénité se dégage peu à peu un charme indéniable.

Belle leçon d'équitation en vérité !

Bernard CHIRIS
Salon du cheval de Montpellier, Avril 2001
Eisenberg
 
Interview du Docteur Filipe Graciosa
Directeur et Ecuyer en chef de l'Ecole Portugaise d'Art Equestre
 

 Bernard CHIRIS :
Votre solo était époustouflant, votre cheval est extraordinairement dressé…

Dr Filipe GRACIOSA :
C'est un cheval très compliqué. Il est extrêmement énergique. Son comportement est irrégulier. Il est particulièrement délicat et peut se montrer très échauffé.

BC : Comment l'avez-vous dressé ?

Dr FG :
Comme tous les chevaux de l'école il a été débourré vers les trois ans et demi. Il a maintenant dix ans.
Son dressage a demandé beaucoup de travail, beaucoup de travail et beaucoup de patience.
Je le travaille deux heures par jour…il faut une entente parfaite…n'être jamais en guerre avec lui.
Il est très sensible et réactif. Il faut le monter "sur le flottement du pantalon".

BC : Que conseillez-vous pour rapprocher les changements de pieds ?

Dr FG :
Jusqu'au deux temps vous pouvez conserver un équilibre horizontal. Mais plus vous vous rapprochez des deux temps, plus le cheval doit commencer à s'asseoir, à s'arrondir.
Au temps, avec un peu d'habileté vous obtiendrez deux ou trois changements de pieds…mais si le cheval n'est pas assis, vous n'irez pas plus loin.
La difficulté c'est d'en obtenir cinq à sept au temps. Une fois ce stade atteint dans la décontraction vous pouvez aller jusqu'a deux cents !

BC : Les spectateurs, souvent cavaliers, ont été frappés par la lenteur des cadences…

Dr FG :
La cadence doit être lente, dans l'esprit de la décontraction, avec une demi-tension des rênes.
Le brillant vient du travail, de la manière dont vous travaillez et non du travail forcé. C'est très important.

BC : Vous êtes l'Ecuyer en chef de l'Ecole. Que demandez-vous à vos écuyers ?

Dr FG :
Je combats la mauvaise équitation, je combats les chevaux encapuchonnés. C'est interdit à l'école.
Pour obtenir le brillant, il faut une encolure haute, soutenue, une avant-main qui se grandit, mais jamais forcée, la décontraction, la demi-tension des rênes.
Je demande un contact léger avec le mors, et une grande discipline dans ce contact.

BC : A quel âge les chevaux de l'école intègrent-ils les présentations officielles ?

Dr FG :
Après plusieurs années, mais jamais avant trois années de travail. C'est vraiment un minimum, oui un minimum.

BC : Qu'appréciez-vous chez l'Alter Réal ?

Dr FG :
C'est un cheval très brillant, spectaculaire, au caractère très fin, délicat, aux qualités artistiques développées.
Il y a une grande unité de robe bai, de taille, de modèles dans nos Alter.
C'est un cheval de type "baroque", particulièrement apte au travail d'école, au rassembler et aux airs relevés.

BC : Quels sont les projets de l'Ecole ?

Dr FG :
Le grand projet, auquel nous travaillons depuis des années, est de s'installer au "Manège Royal" au cœur de Lisbonne, actuellement musée des attelages et des carrosses.
Le cadre est grandiose. Le ministère de la culture a acheté le bâtiment au Ministère de la Guerre… Le projet avance.

BC : Encore merci pour la beauté de votre représentation et pour ces conseils…

Dr FG : 
Merci. A bientôt. 

Interview réalisée par Bernard CHIRIS





 

L'Ecole Portugaise d'Art Equestre




L'Ecole Portugaise d'Art Equestre, grande école européenne fondée en 1979, est l'héritière du Manège Royal, Académie Equestre de la Cour Royale Portugaise disparue au 19eme siècle.

A l'instar de l'Ecole Royale Andalouse et de l'Ecole Espagnole de Vienne, l'Ecole Portugaise d'Art Equestre a fait de l'équitation un art.
L'Ecole est chargée de conserver, de faire connaître et de faire vivre cet extraordinaire patrimoine hérité du 18eme siècle.
Cette équitation académique n'a jamais cessé d'influencer la façon de monter au Portugal, notamment grâce à la pratique, jamais interrompue, de la tauromachie équestre et de l'aptitude remarquable au travail d'école du cheval lusitanien.

Le lusitanien "Alter Réal" est sélectionné depuis 1748 à la "Coudeleria Real "( Haras Royal ) d'Alter do Chao au Portugal. Son aptitude au rassembler, l'harmonie de son équilibre, le brillant de ses allures, sa noblesse et sa beauté en font le type même du cheval de Haute-Ecole.
L'homogénéité de modèle, de robe, de geste et la prestance exceptionnelle de ce cheval font de l'Alter Réal le partenaire idéal de l'Ecole portugaise.

 

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