LA RECTITUDE

Article de Bernard CHIRIS pour la revue Cheval Lusitanien Magazine- 2008

Comme la plupart des quadrupèdes, le cheval a souvent une tendance naturelle à se traverser. Son incurvation est presque toujours plus prononcée d'un côté que de l'autre. Dresser un cheval, c'est rechercher la justesse de l'attitude, la liberté des allures, la relaxation de l'ensemble. Mais il ne saurait y avoir de perfection des déplacements, de symétrie des allures et de légèreté sans rectitude. Un cheval est un instrument de musique qu'il faut accorder.
La rectitude donne le ton juste !

Le cheval droit

Un cheval est droit lorsque les hanches se déplacent sur la même ligne que les épaules. Les postérieurs suivent exactement les lignes tracées par les antérieurs, l'activité de chaque postérieur est égale, la poussée des hanches se transmet intégralement et symétriquement vers l'avant.
Les hanches sont au même niveau, l'encolure est dans le prolongement de la colonne vertébrale, les deux oreilles et la nuque du cheval sont à la même hauteur. Tendu par l'impulsion, en équilibre et disponible, il peut se porter avec aisance dans n'importe quelle direction.

La rectitude se caractérise par la franchise des allures, l'absence de contractions parasites et de torsions de toutes sortes. Elle réclame l'adhésion du cheval aux projets du cavalier! Comme l'impulsion, la rectitude est un état d'esprit. Le cheval est droit dans ses hanches, droit dans ses épaules et droit dans sa tête! L'expression est d'ailleurs passée dans le langage courant. On est droit lorsqu'on ne dévie pas de sa ligne!

Le cheval est droit sur le cercle lorsqu'il en épouse avec facilité la courbure, de la tête à la queue, sans dévier de sa ligne avec ses épaules ou ses hanches, sans peser à l'extérieur ou à l'intérieur. Il change alors avec aisance d'incurvation sans quitter sa trajectoire, comme sur la serpentine.

Un cheval déséquilibré par un cavalier portant son poids d'un côté plus que de l'autre est obligé de se tordre pour compenser ce handicap. Il se contracte et dévie souvent de son axe avec son arrière-main ou son avant-main. La rectitude vaut donc autant pour le cavalier que pour le cheval! Chaque cavalier doit veiller à conserver ses hanches et ses épaules à la même hauteur, bien dans l'axe, parallèles à celles du cheval.
Il n'y a pas de rectitude sans impulsion, sans régularité des allures, sans équilibre du cheval, sans contrôle de l'attitude, sans relaxation. L'équitation est un tout, l'un ne va pas sans l'autre! L'abandon, l'inattention ou l'indiscipline, les contractions, ne favorisent pas la recherche de la rectitude. Vouloir agir dans ces conditions est illusoire.

Quelques conseils

Pour redresser un cheval qui se traverse, remettez les épaules devant les hanches. Restez à l'écoute du cheval. Réagissez dans l'instant. Ne laissez pas le déséquilibre s'installer, le cheval se tordre, fuir avec ses hanches ou s'échapper en pas de côté. Rétablissez le mouvement en avant en remettant les épaules devant les hanches.
C'est à vous de sentir, d'avoir le sens du cheval juste. Laisser le cheval se traverser, sortir du " canal des aides ", c'est accepter qu'une bonne part de l'impulsion se perde, c'est ne plus être en harmonie avec le cheval et entamer un dialogue de sourd. Rétablissez le dialogue en redressant le cheval!
Equilibrez vos aides. Gardez le cheval dans la balance des talons, dans le canal des aides. Ayez des actions bien égales des deux côtés, chaque action devant être contrebalancée par une action antagoniste.
N'opposez pas sans cesse vos mains à l'action des jambes. Un cheval comprimé cherche à s'échapper en déviant sa croupe, le plus souvent en dedans. Il se traverse. Il n'est plus droit. Travaillez la maîtrise des hanches du cheval, le contrôle de son incurvation par le travail sur le cercle, le travail de deux pistes aux trois allures, l'arrêt et le reculer. Veillez tout particulièrement à contrôler la rectitude et l'engagement des postérieurs dans les transitions. Lorsque vous travaillez le long d'un mur, ne laissez pas le cheval coller ses épaules à la paroi. Gardez-lui les épaules un soupçon en dedans. N'hésitez pas à vérifier la rectitude du cheval en travaillant sur une piste intérieure ou sur la ligne du milieu.
Lorsque vous rassemblez davantage, notamment dans les airs relevés, ne laissez jamais la croupe s'échapper, veillez à la symétrie parfaite de l'attitude et du geste, à l'activité équilibrée de chaque partie, de chaque diagonal. Gardez le cheval serein, actif, bien dans l'axe.

Que faire lorsque le cheval se traverse au galop

Si votre cheval met les hanches en dedans au moment du départ au galop, demandez plutôt le galop par une action de la jambe intérieure à la sangle sans trop reculer votre épaule extérieure. Multipliez les départs au galop à faux le long de la paroi: les hanches seront ainsi mieux contrôlées. S'il se traverse pendant la préparation du départ, agissez ainsi: prenez le grand côté au pas en épaules en dedans, aprés avoir fait éventuellement un cercle en épaule en dedans, puis en rentrant dans le coin, redressez délicatement le cheval et demandez le départ. S'il tend à se traverser lorsque le galop est établi, employez de preférence des aides latérales intérieures, ou ayez des aides diagonales très discrétes, peu marquées, en ayant une jambe extérieure très peu reculée.

La rectitude est harmonie

Comme l'impulsion et la relaxation, la rectitude est une préoccupation majeure du cavalier. S'il ne doit cesser d'y penser, le cavalier doit surtout sentir. Sentir viscéralement que les épaules du cheval s'échappent, que les hanches se dérobent, que le cheval n'est plus dans l'axe. Le manque de rectitude entraîne souvent une perte de l'impulsion, une torsion de nuque, une altération de l'équilibre, à moins que ce ne soit l'inverse !

La rectitude est harmonie. Associée à l'impulsion dans la relaxation, elle libère les forces du cheval et permet la légèreté. Le cheval est alors calme, en avant, droit pour reprendre la célèbre formule. Un cheval droit se donne sans retenue, en équilibre, attentif à la moindre sollicitation du cavalier.

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