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Bernard CHIRIS

L 'IMPULSION
de Bernard Chiris

paru dans la revue Cheval Lusitanien Magazine-Décembre 2007/Janvier 2008

L'impulsion, c'est le maintien de l'énergie dans la cadence et la légèreté...

Le mouvement vers l'avant ne saurait à lui seul définir l'impulsion. Le cheval de course et le piaffeur manifestent une très grande impulsion. Pourtant l'un galope au maximum de sa vitesse et l'autre reste sur place ! L'impulsion n'est pas la vitesse, mais l'énergie et la vibration avec lesquels le cheval se donne et travaille.

C'est un état d'esprit, un désir mental et physique du cheval de se porter en avant, de se mettre naturellement en mouvement avec énergie, constance et plaisir. Elle se traduit par le désir de répondre avec promptitude à toutes les sollicitations du cavalier, à partir de n'importe quelle allure, et à continuer le mouvement avec entrain sans le secours des aides. Un cheval est dans l'impulsion lorsque, dans une allure ou un exercice donné, il conserve sans intervention du cavalier la même attitude, la même dose d'énergie et le même équilibre sans altérer sa cadence. L'impulsion, c'est le maintien de l'énergie dans la cadence et la légèreté, c'est sentir que le cheval développe la même dose d'énergie sans augmenter la vitesse. Il n'y a pas d'impulsion sans cadence et pas de cadence sans impulsion.

Tous les chevaux ne possèdent pas une impulsion naturelle.
Créer, développer, canaliser et entretenir l'impulsion en fonction de l'équilibre recherché du cheval est un objectif constant du cavalier. Le cheval doit apprendre à réagir avec énergie et à vibrer à la moindre sollicitation du cavalier. Si l'on attribue à l'assiette et aux jambes du cavalier un rôle principal, tout concourt dans l'attitude du cavalier au réveil et au maintien de l'impulsion: la relaxation et l'équilibre; l'opportunité des actions, l'accord des aides, la justesse du contact et la subtilité de la main, la confiance en soi et la relaxation mentale...
Répeter les actions de jambes, les mouvements d'assiette alors que la main est dure et empêche le mouvement de passer, alors que le cavalier n'est pas en équilibre, ne fait que durcir le cheval. L'impulsion "portée"et entretenue mécaniquement n'est pas l'impulsion. Elle n'est que gesticulation et gymnastique inutile!

CHIRIS
Epaule en dedans: le mouvement est énergique,ample et fluide. Le cheval est dans l'impulsion et la relaxation.

© Chiris

La leçon de jambes

La première éducation de l'impulsion se fait en longe. Elle est d'une importance capitale. Dès le débourrage, le cheval doit être vigoureusement envoyé vers l'avant sous l'effet de la chambrière associée à la voix. Si ce travail est bien mené, avec calme et précision, le cheval apprend à respecter les ordres et à réagir vers l'avant. Tout concourt à la création et au développement de cette impulsion: la position du longeur, son attitude, ses gestes, sa détermination et son calme...

La philosophie est la même lorsque le cavalier est en selle. Le cavalier donne une leçon de jambes au cheval en associant l'action des jambes avec celle de la cravache appliquée vivement et brièvement derrière la jambe. D'Orgeix procédait ainsi...Le cheval établit vite le lien et ne tarde pas à se porter vigoureusement en avant à la moindre action des jambes. A condition que la main; ou le retrait de la main, involontaire et inconscient, ne vienne pas entraver le mouvement.

La leçon de jambes peut être répétée si le cheval commence à ne plus réagir. Elle doit être donnée à tout cheval flegmatique. Il ne s'agit pas de punir le cheval, mais d'établir une corrélation entre l'action des jambes, légère et rapide, et le mouvement vers l'avant pour créer l'impulsion.
A partir de là, le cavalier n'accepte plus que le cheval ne réponde pas. L'impulsion devient vite une seconde nature, la plus petite indication suffit alors. Le cheval est mentalement dans l'impulsion. Mais si la leçon de jambes est précieuse pour mettre en avant le cheval flegmatique, elle ne saurait créer et entretenir de façon mécanique l'impulsion L'action impulsive de l'assiette est tout aussi importante. La flexibilité du rein conjuguée à l'action de la ceinture et du buste permet de transmettre les désirs du cavalier, de pousser le cheval, de jouer sur l'équilibre. On ne doit pas déplacer l'assiette à chaque foulée, gesticuler ou cirer la selle pour donner de l'impulsion au cheval. L'assiette du cavalier ne doit bouger ni plus ni moins que le dos du cheval. e

L'impulsion sans le calme et la relaxation n'est qu'agitation

Mais l'impulsion seule n'est guère utilisable ! Il ne saurait y avoir d'impulsion sans contrôle, sans soumission, sans souplesse. Contrôler et régler l'impulsion, c'est maîtriser la volonté du cheval, l'action de l'arrière-main et obtenir le respect absolu de la main. La main du cavalier agit comme un filtre : elle laisse passer la dose d'impulsion nécessaire et la dirige. L'impulsion sans la rectitude n'est qu'énergie perdue.
Garder un cheval droit, c'est permettre à l'impulsion de s'exprimer. La poussée des postérieurs est efficace dans la mesure où elle se transmet à l'ensemble du cheval, des hanches aux épaules, sans résistances ni torsions.

L'impulsion sans le calme n'est qu'agitation.
Obtenir sous prétexte d'impulsion des gestes brusques, désordonnés, des mouvements saccadés ou violents, est bien éloigné de l'Art Equestre. L'impulsion n'est pas l'énervement, mais l'énergie dans la décontraction, l'énergie dans la cadence. Augmenter l'impulsion, c'est augmenter l'énergie sans augmenter la vitesse.

Le dressage du cheval consiste à créer les conditions d'une bonne impulsion, à la canaliser, à la répartir harmonieusement, avec équilibre et justesse.
Monter avec art, c'est obtenir le maximum d'impulsion compatible avec une réelle décontraction, avoir un cheval actif et léger. Si la vibration naturelle du cheval est un atout d'importance, l'impulsion véritable résulte avant tout de la justesse de l'attitude et de l'équilibre du cavalier.
La relaxation précède l'impulsion. Vouloir pousser d'abord et décontracter ensuite est illusoire.
La relaxation, la cadence, l'impulsion et la rectitude appartiennent à la même famille. Elles sont indissociables. Tout est lié. Un cheval en place libère plus facilement son impulsion, mais l'impulsion place le cheval. La mise en main résulte d'une impulsion supérieure dans la décontraction... Beaucoup de difficultés apparaissent par manque d'impulsion et se résolvent en l'augmentant. Avant tout exercice ou changement d'allure, assurez-vous qu'elle est suffisante. Un exercice commencé dans l'impulsion devient facile : mettre le cheval dans l'attitude et l'équilibre requis, de demander, puis simplement veiller à ce qu'il reste
dans l'équilibre et la cadence.

Quelques conseils

"Mettez le cheval dans une attitude juste. Animez-le en recherchant avant tout la régularité de l'allure, l'équilibre, la cadence et la relaxation pour faire naître l'impulsion, le désir du mouvement, l'envie de gaieté".(1)

Ne le bousculez pas. Faites monter l'impulsion, mais au premier signe de contraction, modérez vos exigences. L'impulsion dans la contraction ne fait que durcir le cheval. Elle entraîne de sérieuses difficultés.
Soyez économe de vos jambes, agissez peu et à propos. Si vos actions de jambes sont permanentes, lourdes, si vos jambes restent plaquées, serrées, le cheval va se blaser, s'éteindre et devenir flegmatique. Mais s'il s'endort, réagissez à l'instant. Soyez rapide, précis, opportun et léger dans vos actions. Mais plutôt que de le réveiller, ne le laissez pas s'endormir !

"Pour conserver l'impulsion, ne vous installez pas dans la routine, éveillez l'intérêt du cheval, gardez-lui sa fraîcheur, n'exigez pas plus qu'il ne peut donner."(2)

Cessez d'agir lorsque l'impulsion est là. Le cheval doit travailler dans une constance de position, de rythme et de vibration le plus longtemps possible sans que vous ayez à intervenir. L'équitation est faite d'une foule de petits détails…L'énergie, l'impulsion, le désir de se porter en avant, de se mobiliser sont des atouts précieux.

L'impulsion n'est pas une question de jambes ! C'est une attitude mentale.

Le cheval est alors un partenaire joyeux, heureux de vous donner toute son énergie, tout son cœur, toute son impulsion.

Bernard CHIRIS 1 et 2: Extraits de "L'art de monter à cheval". Bernard Chiris. Editions Belin. 2003.

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